Le chef-d’œuvre d’Amaury Nauroy
Et voilà que dans les clairières de novembre, déconcertant le gris des jours, il y a ce livre qui vous a ouvert ses heures, ce livre dans lequel vous êtes emporté parce que sa phrase dense et musicale vous aimante, que vous y êtes dans la meilleure des compagnies, avec quelqu’un qui vous partage sa quête dans l’écriture et vous découvre des mondes. Vous êtes donc bien dans le premier livre d’Amaury Nauroy, dans ces «Rondes de nuit» dont la couverture figure un détail du tableau de Rembrandt («La Ronde de nuit»), cette toile que l’auteur a eu sous les yeux quand il écrivait, et où le livre commence. Avec cette figure étonnée, à la fois émerveillée et sans mot de cette enfant, courant au milieu d’un vacarme qui l’ébahit. Et la parole vient, la phrase grimpe, prend son souffle lent et clair, trace un parcours inédit dans la Suisse romande, cherche au plus fin à voir ce personnage que fut l’éditeur Henri-Louis Mermod, mais dans le regard de sa fille, de Jacques Chessex (dont voici un portrait inouï), dans la ronde de Philippe Jaccottet, d’Anne Perrier, de Landry et de tous ceux avec qui la phrase dialogue et se lie dans les temps. Quel chemin superbe que celui d’Amaury Nauroy (né à Vernon, en Normandie): un chef d’œuvre, comme diraient les compagnons.
par Jean-Dominique Humbert
rédacteur en chef adjoint